mardi 19 août 2008

(9)

Le proverbe le dit, la parole est d'argent et le silence est d'or. Merci, donc aux lecteurs en or, même si j'aime bien également ceux qui se font d'argent !

Il faisait beau soleil, ce matin tout de même un peu frisquet du mois de Septembre. L'autobus jaune s'arrêtait pratiquement à toutes les maisons, pour éviter aux petites jambes des enfants de devoir parcourir des distances trop longues, avec leur sac-à-dos sur les épaules.

Embarquer dans l'autobus scolaire était pour moi un événement à tous les jours, cette année là. Les grands de sixième année étaient assis complètement à l'arrière : c'étaient eux qui menaient le bal. Graduellement, en avançant dans l'autobus, on pouvait constater que l'âge diminuait systématiquement. J'étais souvent assis à l'avant, derrière le conducteur, Daniel à mes côtés.

C'était la fin de notre première semaine d'école. On entrait dans le monde.

Ce matin là, Daniel m'avait suggéré de prendre un banc plus à l'arrière. Complètement dans la jungle. Ça faisait deux minutes qu'on était assis, on se trouvait pas mal vieux. Et c'est là que c'est arrivé. Un morveux, littéralement parlant parce qu'il avait de la morve au nez, est arrivé et nous a demandé ce qu'on faisait là.

J'étais gêné. Mais Daniel et moi, on était bien assis où on était. Et le morveux a pas aimé ça. Pourla première fois de ma vie, j'ai vu des étoiles en plein jour. Pas mal d'étoiles, même. Puis, au moment où je rouvrais les yeux, un goût de salé a envahi ma bouche. Et mon nez a commencé à être pesant.

Recevoir son premier coup de poing sur le nez, c'est comme se faire dévierger la figure. Au début tu te demande ce qui se passe. Puis tu réalises. Enfin tu te décides à participer, toi aussi, à l'action.

J'ai décidé à vingt et un ans de participer à l'action. Un peu à retardement. Je suis entré dans la police. Pour arrêter des morveux, les mettre en taule.

Je regarde Vanessa. Elle sort de l'auto de patrouille la main sur son Glock. Je l'imite et je prends conscience.

Elle aussi, elle est belle. Putain, qu'est-ce qu'elles ont toutes à être belles ?

Je m'approche de la fenêtre côté conducteur et je demande au morveux de mettre les mains sur le volant. Je regarde ses mains, fines. Des doigts de pianistes. Des doigts de femmes. J'entends Vanessa. Crier. Je me tourne et la voie en train de se tirailler avec un gars de pas loin de six pieds.

Je jette un dernier coup d'oeil à la fenêtre conducteur. Je vois un fille de seize ou dix-sept ans. Son mascara coule. Elle pleure

5 commentaires:

Sally Fée a dit…

Cela me plait ce retour en arrière qui sert bien la scène du présent. On comprend la motivation du petit garçon à contribuer, une fois grand, à ce que cesse la violence inutile du plus fort.

Anonyme a dit…

Je suis tout à fait d'accord Conte de fée. Cette façon d'amener le sujet est puissante et dépasse de beaucoup la superficialité d'une simple description.

Frédéric Pauzé a dit…

Merci pour vos commentaires.

Je dois vous faire un aveux. Je n'ai pas de plan à proprement parlé pour cette histoire.

C'est une sorte d'hymne aux années passées, aux bons moments de la vie. Le brun sied parfaitement à la teneur de mon récit.

Vous remarquerez peut-être que le tout se déroule l'automne. Au moment où on commence à regrette l'été, un peu comme le personnage principal regrette probablement le temps où il se trouvait à attendre l'autobus, avec Daniel.

Un peu comme il regrette sa relation passée. Frédéric exprime avec hésitation son attachement pour le passé : dans sa tête, c'est une situation où il connaît toutes les facettes... alors qu'il peine a avoir une emprise sur son futur.

La suite viendra probablement lundi ou mercredi. J'ai du boulot par dessus la tête en ce moment :)

Sally Fée a dit…

Je suis patiente...

Il semble qu'il n'y ait pas de méthode meilleure qu'une autre pour écrire. La mienne, le plus souvent, consiste à déposer mes doigts sur le clavier et d'ouvrir les vannes. C'est ainsi que j'écris le mieux.

Actuellement je travaille sur deux histoires pour enfants. Le seul procédé qui diffère de mes autres textes est que cette fois-ci j'ai dessiné les personnages principaux (un ourson et un chat en peluche!!!). De leur avoir donné vie m'a aidée à les situer dans l'histoire et à me les rendre plus réels.

La création littéraire n'est-elle pas la plus belle des passions?

Anonyme a dit…

@Contes de fée:

Je crois que la création, dans son sens large, est la plus belle des passions.

Certains s'adonnent au sport, d'autres à la télévision, etc, et n'auront jamais le plaisir de savourer une oeuvre créée par eux.

Personnellemnt, je ne pourrais me résoudre à ne pas tenter de dépasser certaines de mes limites en créant quelque chose, ne serait-ce qu'une histoire inventée au coucher de mon fils...

Écrire, faire de la musique, peindre, sculpter ou faire n'importe quoi qui appelle de la transformation est nécessaire, vital.